L’année 2022 promet d’être une année noire pour la pêche professionnelle. Déjà impactée par le plan européen WestMed utilisant de manière drastique le nombre de jours de pêche autorisés, voilà que la flambée du prix du gasoil réduit largement la rentabilité ! Président du comité régional l’annonce : d’ici une semaine à dix jours, les bateaux resteront à quai si aucune solution n’est trouvée.
La pêche professionnelle a ceci de particulier et d’atypique, qu’elle ne peut répercuter ses frais sur le prix de vente du poisson pêché. C’est le principe des criées où les enchères sont inversées. N’agissez pas, avec le litre de gasoil à 1,10 € actuellement, tarif qui va encore vraisemblablement augmenter ces prochains jours ou semaines, la situation va empirer. Président du comité régional des pêches, Bernard Pérez, multiplie les réunions pour palper les poules de la profession. Et elle ne va pas bien. À ce stade, vous voyez une semaine de dix jours, les bateaux resteront à quai si aucune solution n’est trouvée.
« J’ai le souvenir que le lors du premier confinement, on nous a demandé de repartir à la mer pour » nourrir la population « . On a joué le jeu, pris des mesures sanitaires drastiques. On a pêché, fourni, fait le travail . Désormais, c’est nous qu’il faut aider »dit Bernard Perez.
Quand il dit « nous », c’est tous les métiers de la pêche professionnelle et pas seulement la cinquantaine de chalutiers d’Occitanie. Il peut inclure les petits métiers qui ne pas, non plus, répercuter le prix du carburant sur la vente du poisson. Et surtout, il tire la sonnette d’alarme.
Réunions de crise
Jeudi soir, une première « réunion de crise » aura lieu en visioconférence avec le préfet de Région. Il faut savoir aussi que le ministère de la Mer, a donné des réponses au représentant des pêcheurs d’Occitanie, comme aux représentants des Régions. « C’est un fait, nous sommes entendus et écoutés. Cependant, les intentions sont une chose, mais les actes doivent suivre. Nous avons alerté les élus, l’exécutif, etc. Le message est reçu, visiblement, mais maintenant, il faut des actes, rapidement »asséné Bernard Perez.
Ces actes, ce sont des aides pour rabaisser via des compensations le prix du litre de gasoil au seuil de rentabilité. C’est-à-dire à 60 centimes d’euros. « Ce ne sera pas une dépense incommensurable pour nos partenaires qui veulent sauver la pêche française et en Méditerranée. Il suffit de quantifier le volume de carburant par station, ce qui sera fait rapidement, et d’évaluer les compensations pour que nous puissions continuer à travailler et surtout éviter les fermetures des criées, ce qui aurait d’irréversibles conséquences pour l’ensemble, et je dis bien l’ensemble, de la profession « ajoute le président du comité régional des pêches.
Heureusement, le « marché » se porte plutôt bien actuellement. Mais jusqu’à quand ? Et puis, cette question, qui revient souvent. Ce système archaïque napoléonien qui consiste à ce que chaque marin embarqué partage les frais, notamment, de carburant, se retrouve bientôt à gagner la moitié d’un Smic ? 2022 est une année de crise, et peut-être de révolution dans le secteur de la pêche …
> Les réponses du ministère de la Mer au Comité national des pêches maritimes et des élevages marins
Les pistes sont encore avancées par l’Etat
Voici quelques extraits d’un document, encore confidentiel, que nous avons pu nous procurer, signé par le directeur de cabinet de la ministre de la Mer. « Le Gouvernement organise dès la semaine prochaine une réunion entre les pétroliers et les professionnels. Le premier objectif de cette rencontre est de s’accorder sur un dispositif de lissage du prix du carburant. (…). Un travail est en cours sur une prise en charge exceptionnelle des charges sociales, dans sa stricte dimension euro compatible. L’enveloppe doit pouvoir être définie en lien avec vous pour servir au mieux les armements les plus impactés. Nous sommes à pied d’œuvre pour y parvenir, une communication est à prévoir dans les jours qui viennent sur le montant et la méthode retenues, en insistant sur le traitement des cas les plus graves par des dispositifs immédiats. Le Gouvernement a déjà annoncé que toutes les entreprises (notamment celles du secteur de la pêche) éprouveraient des difficultésés de remboursement de leur PGE pourraient bénéficier d’un rééchelonnement auprès du Médiateur du crédit, dans des conditions fixées en fonction de la situation individuelle, et pou vant conduire à reporter la première échéance jusqu’à six mois et à allonger la maturité jusqu’à 4 années supplémentaires. (…) Des échanges complémentaires pourraient avoir lieu avec le secteur bancaire sur les cas particuliers évoqués ensemble. Des discussions auraient lieu avec la grande distribution pour que le choc du prix des carburants soit partagé par toute la filière et l’interprofession. Des discussions auront lieu avec les autorités portuaires pour travailler à une participation à une prise en charge ponctuelle et exceptionnelle des frais de criées. (…) Le ministère de la mer participera aux travaux du Gouvernement dans le cadre du plan résilience et fera valoir les enjeux de la pêche. Nous insisterons notamment sur l’évolution des lignes directrices de l’Union européenne en matière d’aides d’Etat ».
« Au delà des intentions et d’une attention que nous apprécions, il faut maintenant des actes, du concret », dit le président du CRPEM, Bernard Perez.