Il préfère le réchauffement climatique, la montée de l’eau de mer dans les marais camarguais, détruisant peu à peu la culture du roseau avec un petit emblème.
« Avant, à la Tour Carbonnière, il y avait une roselière. Aujourd’hui, les touristes ne la remarquent peut-être pas, mais c’est maintenant un désert. » Dans la famille Prévot à Vauvert, les roseaux de Camargue ont été cultivés pendant trois générations autour de la ville d’Aigues-Mortes.
Mais Nicolas Prévot, 55 ans, contribue à détruire son monde. « C’est catastrophique, les marais disparaissent visiblement. Dans les années 80, nous étions 7-8 concurrents et à l’époque, il y avait un roseau pour tout le monde. L’année prochaine, nous ne serons plus que deux, partout en Camargue.
Observation partagée par d’autres sagneurs de la région. Ensemble, les parcelles auxquelles appartient la famille ne représentent que 1 000 hectares de terres. Il vend ensuite la plante en rondins pour le chaume ou l’isolation.
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Le Rhône, un fleuve malade
Deux mots commencent à expliquer la fin de la pêche du roseau camarguais : eau douce. Depuis une vingtaine d’années, le Rhône et surtout le Petit Rhône, nourrissent les infusions des étangs, ont perdu leur débit. 30% selon Nicolas Prévot.
Le changement climatique, des étés plus chauds et plus secs sont souvent mis en cause. « Mais on peut ajouter à cette action humaine en amont, le sélecteur de roseau suit. Le Rhône est un fleuve pollué. « Résultat : là où le roseau est encore présent, il est moins dense, moins haut, moins joli. « Par exemple, nous sommes en train de remplacer les vieux toits de chaume installés par mon grand-père. Leur qualité n’a rien à voir avec les roseaux d’aujourd’hui.
Ainsi l’affaiblissement du fleuve permet à la mer de pénétrer dans les terres, aussi bien dans le lit du cours d’eau que dans les nappes phréatiques. Ce qui laisse une porte ouverte sur la Méditerranée. « La mer ne perd jamais de sa force. Elle monte jusqu’à Saint-Gilles maintenant », Nicolas Prévot a pris peur. Dans les régions où l’eau salée est reine, l’engane et la salicorne remplacent les roseaux et les marais.
Les rizières, les prochaines victimes
« La Camargue est sous le niveau de la mer. Depuis sa création par les dégâts du Rhône, sa vie, sa culture, est liée à l’eau que produit le fleuve. Cédric Santucci est riziculteur et vice-président de la chambre d’agriculture du Gard. Qu’est-ce qu’on fait pour les roseaux, « il ne reçoit pas encore de riz « , admet-il, grâce à la présence d’eau douce.
Cependant, le secteur est habitué à ce phénomène : « La crise rizicole des années 1970 a entraîné le retour de la salinité dans les zones où l’exploitation s’est arrêtée. C’est pourquoi l’État a lancé un grand plan de relance pour sauver la profession. Dans les années 80.
Activité populaire
A peine récolté, le roseau ne reste pas longtemps dans les hangars camarguais. Une fois séchés et tressés en ronds, les roseaux sont vendus pour fabriquer des toits, des clôtures ou des isolants.
La clientèle est majoritairement française, située en Normandie et en région parisienne. Soumis à la concurrence chinoise, l’anche de Camargue s’est légèrement améliorée pendant la pandémie grâce au circuit court et au renouveau des matériaux écologiques.
Jusqu’à 220 000 lots de roseaux peuvent être produits sur 1 000 hectares. Ils se vendent jusqu’à 2,70 € pièce. Il faut une dizaine de tresse de 1 m2 paille.
L’agriculteur a maintenant besoin d’un nouveau soulagement. « Avec les étés plus secs et plus chauds, le Rhône manquera de plus d’eau. Mais si la mer monte encore plus, nous souffrirons après. Il faut aussi repenser le découpage de la Camargue entre les activités. «
Pendant la saison de chasse, les chasseurs souhaitent que l’eau des marais soit conservée en permanence afin d’empêcher les oiseaux de quitter les lieux. Une pratique qui évite à certaines zones de se dessécher, comme autrefois, afin de conserver l’eau douce pendant les périodes critiques.
Quelles sont les solutions possibles ?
La question de ce fort rendement de salinité en Camargue, dû au changement climatique et à la perte d’eau douce, fait des ravages chez les viticulteurs de la région.
L’été dernier, plus de 500 hectares de vignobles du littoral camarguais ont été détruits à cause du renouveau du sel marin dans les sols.
Suite à ce constat, le syndicat mixte Camargue Gardoise a programmé une réunion à Vauvert le 14 janvier 2022. Un certain nombre d’élus, de représentants de l’Etat, de BRL et d’agriculteurs devraient être impliqués.
« Il a fallu attendre que cela perturbe le vin pour que les choses finissent par bouger », se cache Nicolas Prévot, en espérant que l’initiative débouchera sur quelque chose.
Damba à Aigues-Mortes ?
Certaines idées ont déjà été évoquées pour contrer la montée du sel dans les différentes professions. A la Société d’Agriculture, on s’appuierait dans un premier temps sur l’ouverture plus fréquente de l’écluse de Saint-Gilles pour dessaler le canal du Rhône à Sète tout en recherchant un droit d’avis sur l’attribution future des parcelles agricoles.
D’autres agriculteurs espèrent construire un barrage à Aigues-Mortes pour contrer les avancées de l’eau iodée. « L’Etat devrait commencer à étudier dans ce sens », plaide Cédric Santucci.