Matin aux Halles de Nîmes, après-midi vente aux enchères du Grau-du-Roi. Midi Libre a passé une journée sur le chemin de Dominique Riera, Boss Carmen.
Mais bon sang, ça défile à une vitesse folle ! Sur les grilles, au rythme des crissements du polystyrène et des bips inattendus qui marquent le début et la fin de chaque vente aux enchères, les caisses suivent les caisses sans relief. De 800 à 1000 par heure, jusqu’à 1200, semble-t-il, quand il faut vraiment lancer la balance.
Un vrai train de mine, avec des poiscailles comme passagers ! « Une question d’habitude », rassure Dominique Riera lorsqu’il voit les yeux du béotien commencer à claquer entre les écrans (indiquant l’espèce, le poids, le prix au kilo et le nom du bateau), les poissons et les coquillages et les chanceux tout autour.
Sommaire
La vente aux enchères du Grau-du-Roi, plus importante après Sète
Bienvenue à la criée du Grau-du-Roi, l’une des cinq en Méditerranée. Le plus important après Sète. Le seul qui soit entièrement géré par des pêcheurs. La Coopérative des pêcheurs du Grau-du-Roi (Socomap), qui l’administre, regroupe près de 70 adhérents ; 18 chalutiers, une cinquantaine de « petites embarcations ».
Lire aussi :
Nîmes : 24h sur les traces de Dominique Riera, poissonnier aux Halles de Nîmes
Tel un poisson dans l’eau en coulisses, notre émissaire des Halles de Nîmes navigue alors trois ou quatre fois par semaine ; même tous les jours, en été. Il fait partie des 150 professionnels (semblables poissonniers, grossistes, grossistes ou vendeurs en grande surface) dûment enregistrés et donc autorisés à siéger dans l’amphithéâtre qui distribue 2000 tonnes de poisson par an.
Techniques d’assise n°30
Dominique Riera est toujours assis sur le même siège, le numéro 30. Non, mais. Il n’y a qu’une règle : « La qualité d’abord. Je ne cherche jamais la ‘bonne chose’ au détriment de la qualité. » Pour se faire une idée des prix, l’étalonneur nîmois laisse souvent passer le contenu d’un bateau ou deux avant ses premières acquisitions.
Avec l’expérience, il connaît même ceux qui « pêchent bien », qui retournent de beaux produits. Sur son téléphone : une application qui suit la trace de la flotte en mer, pour savoir combien de navires doivent encore rentrer. Pour ne pas se précipiter, ou inversement, pour ne pas traîner en magasin… Il surveille aussi de près la météo. « Si le temps le prédit, il y aura moins de pêche. Alors j’attends ça avec impatience. »
Parce qu’il ne convient pas à ses clients, il n’achète pas de gros spécimens. « Sauf à l’approche du week-end, aux beaux jours : un plus gros loup, à cinq ou six, ira chercher des barbecues… Si la mer est proche vous pourrez adapter vos achats. »
Tout se joue en quelques secondes
15 heures précises. Une sirène retentit autour de l’immense hangar situé sur la jetée Christian-Gozioso. Après le départ de nuit, les petits navires sont déjà de retour ; les chalutiers, qui vont plus au large, commencent à arriver. Tout le monde se couche à l’intérieur, la vente aux enchères commence. « Enchères hollandaises », précise Dominique. Selon la méthode hollandaise d’échange de fleurs, en effet, les prix baissent jusqu’à un acheteur, grâce au bouton rouge installé sur le côté droit de son siège. Et allez, passons.
Impossible de faire plus froid : venant du pont du bateau à quelques mètres à peine, les caisses de poissons apparaissent au ras d’une cabane qui porte le nom de tout le monde ici « l’aquarium ». A l’intérieur, le « dial seller » n’a que quelques secondes, le temps de peser, de proposer un prix, en fonction du marché et de l’aspect pêche.
Nous mettons tout en œuvre pour maximiser la valeur du produit de la pêche
Et embarquons-nous dans un voyage explicite qui se termine derrière un clivage dans lequel des ouvriers qui s’affairent dans tous les sens sont répartis sur la glace, sur les palettes au nom de leur nouveau propriétaire.
Presque tout est encore vendu. Et quand pas ? « Le reste est utilisé comme appât, pour les pêcheurs ou pour la confection de soupes : nous avons des accords avec des industriels pour cela, il met en lumière Pierre Blanes, directeur de Socomap, 25 ans d’une maison d’horlogerie (principalement dans « l’aquarium »). Nous mettons tout en œuvre pour tirer le meilleur parti du produit de la pêche. «
Bref à la criée du Grau-du-Roi
● SOCOMAP : NON ATTACHEMENT NON
La Coopérative des Pêcheurs est chargée de la criée pour le compte de ses adhérents (réception et vente du poisson, livraison et facturation aux acheteurs et paiement aux pêcheurs, fourniture de glace et emballage) et également une fonction de commercialisation, à travers une partie de la capture pour revente à l’export (Italie et Espagne). Mais ce n’est pas le cas.
Les services fournis à ses membres comprennent : la distribution de carburant. Les pêcheurs ont accès au diesel 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Activité très importante en termes de chiffre d’affaires pour Socomap (CA près de 6 M€ en 2020). Les membres peuvent se procurer tout le matériel nécessaire à leur activité (filets, câbles, vêtements, etc.). La coopérative reçoit un pourcentage fixe du prix du poisson pour payer la main-d’œuvre et l’infrastructure (il s’agit de la « taxe d’enchère »).
● RECOMMANDATIONS DE PÊCHE
Les pêcheurs de Graulens, et leur société coopérative avec eux, s’inquiètent des soutiens lors des manifestations dans la Manche le 11 décembre (ML 12/12). Une source d’inquiétude majeure, pour mémoire : la poursuite de la baisse du nombre de jours de pêche autorisés qui diminuerait de 7,5% l’année prochaine et passerait donc de 183 à 167 jours.
« Alors que le seuil de rentabilité envisagé par les professionnels en Méditerranée, qui était de 177 jours plus tôt, grimpait à 209 jours, en raison de la hausse du prix du gazole, argumente Pierre Blanes, directeur de Socomap. C’est une source d’inquiétude pour marins, mais aussi pour la structure. Et les études montrent qu’un emploi en mer entraîne un emploi en mer. » Socomap compte 22 salariés et fait régulièrement appel à des intérimaires.