Narbonne Plage, puis Leucate et enfin Sigean : entre le mardi 31 mai et le jeudi 2 juin, trois réunions publiques ont permis de présenter le diagnostic sur les risques liés au littoral, entre recul du trait de côte et submersion marine. Des rendez-vous inscrits dans la démarche « Mer en mouvement », qui doit déboucher en 2023 sur un plan d’action pour adapter les 40 km du littoral audois à une inexorable évolution.
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Dénonciateur et montre prendre conscience
Mardi 31 mai, la salle Dominique-Baudis de Narbonne-Plage n’avait pas fait le plein pour la 1concernant réunion publique de la démarche baptisée « Mer en mouvement ». Forcément décevant pour le syndicat mixte du delta de l’Aude (SMDA), le syndicat mixte des milieux aquatiques et rivières (Smmar) et le cabinet BRL Ingénierie, engagés depuis 2020 dans ce programme qui, après un diagnostic technique et une coconstruction de la stratégie d’aménagement du territoire, doit mener en 2023 au plan d’action pour adapter les 40 km et 500 km2 de littoral aux risques littoraux, ce croisement des aléas (recul du trait de côte et submersion marine) avec les enjeux humains et matériels. Maigre assistance, explicite sans peine par Xavier Bélard, l’élu narbonnais président du SMDA : « Quand on arrive à Narbonne Plage et que l’on observe le littoral, il n’y a pas de prise de conscience équivalente à celles que peuvent avoir la Côte d’Azur ou nos voisins héraultais : le sentiment existe que le littoral n’ un pas bougé. » Un argument qui semblerait valider l’affluence à la hausse des réunions de Sigean, jeudi 2 juin, et surtout Leucate, mercredi 1euh juin : « Les gens sont plus impactés et se sentent plus concernés »avançait Etienne Balufin, coordinateur GEMAPI secteur Aude aval du Smmar.
Une vraie mesure et document
Pour les sceptiques, ou les avides de connaissances, ces réunions publiques étaient le moment idéal pour se faire une idée des évolutions récentes et du futur qui attend le littoral. Damien Barral, directeur de projet de BRL Ingénierie, le rappelait. La cuete audio n’est plus ce qu’elle était : « Au XIIe siècle, La Clape était une île, et les étangs et lido se sont formés au XVIIIe. « Un renouveau qui concerne aussi les aspects pratiques. Consacrés à la pêche, mer et littoral sont devenus, stations balnéaires et mission Racine obligeant, des espaces à orientation récréative, quand des infrastructures ont remodelé la façade : à l’exemple de l’aménagement de l’embouchure de l’Aude, à Fleury, pensée pour la navigation et la protection de la viticulture. Des données à intégrer dans un paysage mouvant : entre 1920 et 2020, le niveau de la Méditerranée, mesuré au marégraphe de Marseille, augmenté de 16 cm ; d’ici 2045, il devrait avoir grimpé de 20 cm. Un renouveau qui élargit explicitement la trajectoire du train. Et le changement climatique annoncé jouera son rôle : à Narbonne, entre une hausse de 2° de la température moyenne et des tempêtes plus fortes et plus actives, une tempête centennale en 2100 (1 chance sur 100 de se produire dans l’année, Ndlr ) engendrerait une submersion marine avec des hauteurs d’eau maximales de 2 mètres en zone urbaine. « Ces projections, ce n’est pas de la science-fiction »insiste Nicolas Proust, chef de projet BRL, alors que Kriss Sans, du Smmar, avait rappelé la réalité des coups de mer de 1992 et 1997, tempêtes émises aujourd’hui comme décennales ou vingtenales.
Une réflexion sans « approche dogmatique »
La digue créée pour l’embouchure de l’Aude est revenue dans les échanges avec le public : « Elle a eu des effets sur l’érosion. Pourquoi ne pas la démonter? C’est une vraie question, qu’on devra se poser », avançaient Damien Barral et Etienne Balufin. Un symbole tout trouvé pour illustrer le sens de la démarche. « On sait que les ouvrages ne sont jamais infaillibles »rappelait Nicolas Proust, avant qu’Etienne Balufin ne précise : « Contre des phénomènes de submersion, on sait que lutter n’est pas pour autant la clé. Les ouvrages peuvent apporter un faux sentiment de protection, mais d’autres éléments, comme les enjeux économiques, sont à prendre en compte, à l’ exemple d’un camping qui n’existait pas avant. On ne peut pas avoir d’approche dogmatique. Aujourd’hui, on ne peut pas dire il faut oui ou non démonter, il est un peu tôt pour parler des solutions. » Les choix, qui passeront aussi par les solutions fondées sur la nature, comme avec les précieuses lagunes au rôle de tampon, viendront de la prochaine phase de la « Mer en mouvement »: après un été où les panneaux d’informations ultra-pédagogiques devraient circulant dans les offices de tourisme, trois groupes de travail intégrant des habitants seront formés fin septembre sur les trois zones de travail (Narbonnais, Leucatois, Sigeanais). C’est une proposition qui aidera le traducteur de la promesse stratégique pour 2023.
L’indéniable recul du trait de côte
C’était aussi tout l’intérêt de ces réunions publiques. Livrer les chiffres du diagnostic mené sur le littoral. Avec une évidence : « On a eu, sur la période 1977-2009, une stabilisation du trait de côte, après une période d’acrétion (la plage gagne sur la mer), précisait Nicolas Proust. Mais depuis une quinzaine d’années, le recul est marqué, avec une moyenne de 1,2 m perdu par an sur les dix dernières années. » C’est à la Vieille Nouvelle que le phénomène explose, avec une moyenne de 8,4 m de recul par an, quand à Vendres, la plage gagne 3,4 m par an. Etienne Balufin rebondissait, en évoquant « des peblees de sable qu’on ne voit pas, dans les hauts fonds, comme à Leucate, entre 2000 et 2018. Le sable part au large et ne reviendra pas ». Et évoquait, entre 1977 et 2009 « des zones d’érosion ponctuelles à Gruissan, ou au sud de Narbonne. Depuis 2009, on voit des reculs de 3 à 4 m par an à Mateille, aux Ayguades, à Narbonne Plage ». Narbonne Plage, un internaute utile pour illustrer la réalité : « Entre 2016 et 2019, 2 ha de plages ont été perdus. » L’équivalent de trois terrains de football.